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Un animal doué de raison, le roman de 1967Feu vert livre / BD

Un animal doué de raison (1967)

Sorti en France en 1967 en grand format chez GALLIMARD FR ; réédité en septembre 1971, réédité en poche en 1972, 1973 et février 1989 ; réédité en poche chez FOLIO SF en avril 2001.
Réédité chez GALLIMARD Jeunesse, Les Mille Soleils en octobre 1977 et juin 1991 n’est pas le texte de Robert Merle et l’auteur n’est pas crédité, la date de copyright est fausse.

Adapté au cinéma The Day of The Dolphin (titre français, Le jour du Dauphin) en 1973.
Adapté en bande-dessinée le 6 août 1979 (apparemment le texte de 1977) par Victor Mora au scénario et Carlos Giménez au dessin en feuilleton dans Pif Gadget numéro 541 à 543.

De Robert Merle.

(prospective, presse) Aux États-Unis, de nombreux scientifiques travaillent sur la communication avec les dauphins, dans le cadre des recherches militaires tous azimuts de la Guerre froide. Ces études aboutissent et l'équipe du docteur Sevilla parvient à apprendre l'anglais à un couple de dauphins. Cependant, le fait militaire et le contexte idéologique prennent le dessus, dans le risque palpable de la Troisième Guerre mondiale.…

Robert Merle décroche le Prix Goncourt avec Week-end à Zuydcoote, s’inspirant de son poste d’agent de liaison avec les britanniques à partir de 1939/ En Science-fiction, il signe Un animal doué de raison en 1967 et Malevil, un western post-apocalyptique en 1972. Tous adaptés au cinéma.

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Un animal doué de raison, le roman de 1967Un animal doué de raison, le roman de 1967Un animal doué de raison, le roman de 1967

Le texte original de Robert Merle de 1967 pour GALLIMARD.

I

28 mars 1970

À la maison, William, s’il vous plaît, dit Mrs. Jameson avec la politesse pincée qu’elle utilisait pour parler à son chauffeur (Dorothy, voyez-vous, mes domestiques m’adorent, je n’oublie jamais leur anniversaire et je leur parle toujours poliment), William inclina sa nuque grasse et rasée, il ne se prénommait d’ailleurs pas William, mais Mrs. Jameson appelait ainsi pour simplifier tous les chauffeurs qui s’étaient succédé chez elle depuis la mort de son mari, William posa ses deux mains potelées sur le volant, et loin en avant la Cadillac fit entendre un ronron suave, démarra avec une lenteur infinie, précautionneuse. (…) La Cadillac ralentit, tourna à angle droit et s’engagea avec lenteur dans une allée bordée de cyprès bleus, les graviers criaient sous les pneus, « Professeur, puis-je vous recommander de ne pas dépasser quarante minutes et de parler en termes simples ? »

(…) Mrs. Jameson désigna à Sevilla un vaste fauteuil à oreilles en velours rouge. Il fit face à l’auditoire : quarante paires d’yeux le saisirent, il fit un signe de tête et s’assit. Le coussin céda sous lui moelleusement, il disparut jusqu’à mi-corps. Il fit effort pour se redresser, mais n’arriva pas à décoller ses hanches. Il s’était attendu à prendre place sur une chaise derrière une table où il eût pu disposer ses notes. Mais il n’y avait rien, ni devant lui, ni à côté de lui, pas même une table basse. Enfoncé dans le velours pourpre, et presque englouti par lui, son confort le paralysait. Il ne pouvait même pas poser ses avant-bras sur les accotoirs : il était trop bas pour eux. Pas question non plus de faire tenir une feuille de papier sur le plan incliné de ses genoux. Sevilla porta la main à sa poche, hésita et se résigna à parler sans notes. (…)

Ce Club, en fin de compte, quel alibi dérisoire. Aujourd’hui, on leur parle des dauphins, dans huit jours, de Marcel Proust, dans deux semaines, du Sud-est asiatique. La culture universelle à raison de quarante minutes par semaine. De tout un peu, comme dans une cafétéria.

(…) Mrs. Jameson resta un moment immobile, massive et le menton levé, comme si elle posait pour sa propre statue. On applaudit, elle salua, et les yeux baissés, elle s’assit. Elle prit place sur une petite chaise basse capitonnée. Elle pouvait mieux qu’une autre se permettre d’être humble, étant chez elle. La chauffeuse servait d’ailleurs à deux fins : elle proclamait sa modestie et elle lui reposait les jambes.

— Nous sommes tout ouïe, Professeur, dit-elle d’un air fin et mutin, comme si elle venait d’inventer la formule à son intention.

Mrs. Jameson était assise. Elle tournait le dos au Club. Elle ne le tenait plus dans les tenailles de ses yeux gris, et Sevilla sentit alors chez plusieurs auditrices une vivacité du regard et un amollissement de l’attitude qui démentaient le désintérêt du début. À son grand soulagement, il se sentit de nouveau exister en tant qu’homme, regarda à son tour son auditoire avec amitié et commença d’un ton alerte.

— Depuis quelques années, le dauphin a fait l’objet de tant d’articles, de déclarations, de prédictions, de caricatures, de dessins animés et de scripts pour Hollywood, que j’ai l’impression de n’avoir rien à vous apprendre à son sujet (protestations). Si vous pensez qu’il n’en est rien, si ce n’est pas par courtoisie que vous protestez (non, non), je vais essayer de faire, comme je le peux, le point sur ce problème. Mais, je vous en prie, ne vous attendez à rien de sensationnel ni d’inédit. La recherche scientifique progresse avec lenteur, et la delphinologie n’en est qu’à ses débuts.

« Les Américains, poursuivit Sevilla, sont réputés pour aimer les animaux et se passionner pour leur étude. Mais sans contredit, aucun animal, depuis dix ans, ne suscite chez nous plus d’intérêt, à divers titres, que le dauphin. Il n’en est pas, non plus, qu’on étudie davantage. La Marine U.S. et diverses agences d’État dépensent chaque année des sommes considérables pour financer les travaux de plusieurs équipes de chercheurs, dont celle que je dirige. D’autre part, diverses sociétés privées, comme la Lockheed California Company ou la Sperry Gyroscope Company, consacrent, elles aussi, des ressources très importantes à la delphinologie. Sans pouvoir donner un chiffre tout à fait précis, je ne serais pas étonné si la somme globale dépensée annuellement par elles et par les agences d’État atteignait à l’heure actuelle un total de cinq cents millions de dollars. » (Vif intérêt.)

Sevilla fit une pause pour laisser l’importance du chiffre pénétrer l’auditoire.

— Cinq cents millions de dollars, reprit Sevilla, ça fait beaucoup de cents, mais le dauphin les mérite, telle est ma conviction. En termes simples, et brièvement, comme me l’a recommandé votre présidente (amusement), je vais essayer de vous dire pourquoi le dauphin est devenu l’animal le plus cher et le plus étudié des États-Unis.

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Un animal doué de raison, le roman de 1967, l'adaptation pour la jeunesse de 1977Un animal doué de raison, le roman de 1967, l'adaptation pour la jeunesse de 1977

Le texte anonyme de 1967 ou plus probablement de 1977 pour GALLIMARD.

I

28 mars 1970

Le Club des Amis des Animaux, composé de garçons et de filles de treize à seize ans, attendait, ce mardi après-midi, avec une impatience fébrile, un invité de marque, le Professeur Sevilla, qui avait bien voulu accepter de leur faire une conférence sur les dauphins. Pour permettre plus facilement leur identification, ces élèves, qui n’appartenaient pas à la même classe, portaient, épinglés sur leur poitrine, un petit carton signalant leurs noms et prénoms aux invités.

A quatorze heures juste, le Professeur Sevilla entra dans la grande salle décorée sur trois mus de grandes photos d’animaux de toutes les parties du globe. Les jeunes membres le regardèrent avec intérêt. Il n’avait pas du tout l’air d’un savant, ni même d’un professeur. Il était de taille moyenne, très brun, les cheveux noirs bouclés dans le cou, et ne portait pas de cravate.

La jeune présidente du club, Elizabeth Bronstein, le remercia d’être venu et le présenta, présentation qu’elle bâcla en deux minutes, tant elle sentait que ce n’était pas elle qu’on désirait entendre.

— Mes amis, dit le Professeur Sevilla, je ne veux pas vous faire une conférence, mais vous poser des questions et vous aider à y répondre. D’abord, une constatation : aucun animal depuis dix ans ne suiscite chez nous plus d’intérêt que le dauphin. Il n’en est pas non plus qu’on étudie davantage. A l’heure actuelle, la marine U.S. et diverses agences d’état dépensent environ chaque année une somme de cinquante millions de dollars pour financer les travaux de plusieurs équipes de chercheurs, dont celle que je dirige.

« Je vais essayer de vous dire pourquoi le dauphin est devenu l’animal le plus cher et le plus étudié des Etats-Unis. Et auparavant, vous ne m’en voudrez pas de vous dire quelques mots de sa physiologie. Pour aller plus vite, je vais lâchement profiter du fait que vous portez tous vos noms et prénoms sur la poitrine pour vous poser des questions. Elisabeth Miller, le dauphin est-il un poisson ?
— Non, monsieur. C’est un cétacé.
— John Davidson, quelle est la différence entre un poisson et un cétacé ?
— Un poisson a des branchies et un cétacé a des poumons.
— Ce qui veut dire, John ?
— Il respire l’oxygène de l’air, et doit faire surface pour l’obtenir.
— Marjorie Lawson, y a-t-il d’autres différences ?
— Le poisson est un animal à sang froid.
Le Professeur Sevilla sourit.
— Improprement appelé à sang froid…

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Pif Gadget numéro 541, le magazine de bande-dessinée.

L’adaptation en bande-dessinée de 1979 par Victor Mora au scénario et Carlos Giménez au dessin pour PIF GADGET FR publiée en feuilleton du numéro 541 au 543.

Un animal doué de raison, le roman de 1967, l'adaptation en bande dessinée de 1979 pour Pif Gadget
Un animal doué de raison, le roman de 1967, l'adaptation en bande dessinée de 1979 pour Pif Gadget
Un animal doué de raison, le roman de 1967, l'adaptation en bande dessinée de 1979 pour Pif Gadget
Planches tous droits réservés Victor Mora et Carlos Giménez 1977 / Pif Gadget.

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Ici la page du forum Philippe-Ebly.fr consacrée à ce roman.

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