Foe, le remplaçant, le roman de 2018 de Iain ReidFeu orange livre / BD

Foe (2018)

Sorti aux USA le 7 août 2018 chez SIMON & SCHUSTER US.
Traduit en français le 4 novembre 2021 par Valérie Malfoy (grand format).
Réédité le 9 février 2023 chez POCKET FR (poche).
Adapté en film sous le titre Foe 2023.


Par Iain Reid.

Pour adultes et adolescents.

(prospective, presse) ans un futur proche, Junior et Henrietta vivent dans une ferme isolée, semblant fuir leurs congénères. Lorsqu'un homme en costume-cravate frappe à leur porte, ils sont loin d'imaginer ce qu'il vient leur annoncer : Junior a été sélectionné par la société OuterMore pour un séjour expérimental dans une station spatiale.

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Pourquoi divulgâcher le roman en l’affublant en français d’un titre un peu trop révélateur ? Il s’agit d’un mystère, en mode prospectif. Je n’ai pas eu le temps de lire le roman, il n’a pas l’air original, le coup de la ponctuation est cousu de fil blanc, mais logique. Là encore, un choix curieux de la traduction française a fait disparaître les guillemets pourtant logiques, pour les remplacer par le demi-quadratin qui ouvre une réplique quand l’éditeur veut s’économiser du caractère en zappant les guillemets, et que plus personne n’est capable de savoir comment on utilise des guillemets quand à proximité de signes de ponctuation. Les guillemets dans la version anglaise servent strictement à isoler les paroles des interlocuteurs du narrateur, pour une raison qui n’apparaît clairement que plus tard, dans un rebondissement très facile à prévoir pour quelqu’un qui lit régulièrement de la Science-fiction.

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Le texte original de Iain Reid de 2018 pour SIMON & SCHUSTER US.

ACT ONE

ARRIVAL

Two headlights. I wake to the sight of them. Odd because of the distinct green tint. Not the usual white headlights you see around here. I spot them through the window, at the end of the lane. I must have been in a kind of quasi slumber; an after-dinner daze brought on by a full stomach and the evening heat. I blink several times, attempting to focus.

There’s no warning, no explanation. I can’t hear the car from here. I just open my eyes and see the green lights. It’s like they appeared out of nowhere, shaking me from my daze. They are brighter than most headlights, glaring from between the two dead trees at the end of the lane. I don’t know the precise time, but it’s dark. It’s late. Too late for a visitor. Not that we get many of them.

We don’t get visitors. Never have. Not out here.

I stand, stretch my arms above my head. My lower back is stiff. I pick up the open bottle of beer that’s beside me, walk from my chair straight ahead several steps to the window. My shirt is unbuttoned, as it often is at this time of night. Nothing ever feels simple in this heat. Everything requires an effort. I’m waiting to see if, as I think, the car will stop, reverse back onto the road, continue on, and leave us alone, as it should.

But it doesn’t. The car stays where it is; the green lights are pointing my way. And then, after a long hesitation or reluctance or uncertainty, the car starts moving again, toward the house.

You expecting anyone? I yell to Hen.

“No,” she calls down from upstairs.

Of course she’s not. I don’t know why I asked. We’ve never had anyone show up at this time of night. Not ever. I take a swig of beer. It’s warm. I watch as the car drives all the way up to the house and pulls in beside my truck.

Well, you better come down here, I call again. Someone’s here.

*

La traduction au plus proche

 ACTE UN

ARRIVÉE

Deux phares avant. Je me réveille à leur vue. Bizarres à cause de la teinte clairement verte. Pas les phares avant blancs ordinaire que l’on voit par ici. Je les repère à travers la fenêtre, au bout de l’allée. Je dois m’être trouvé dans un état de somnolence ; une hébétitude d’après dîner causé seulement par un estomac plein et la chaleur du soir. Je cligne des yeux plusieurs fois, pour tenter d’y voir clair.

Il n’y a pas d’avertissement, pas d’explication. Je ne peux pas entendre le véhicule depuis ici. J’ouvre juste mes yeux et je vois les phares verts. C’est comme s’ils avaient jailli de nulle part, pour me tirer de mon hébétitude. Ils brillent davantage que la plupart des phares avant, projetant leur lumière entre les deux arbres morts au bout de l’allée. Je ne connais pas l’heure précise, mais il fait noir. Il est tard. Trop tard pour un visiteur. Non pas que nous en ayons beaucoup.

Nous n’avons pas de visiteurs. Jamais. Pas dans ce trou perdu.

Je me lève, j’étire les bras au-dessus de ma tête. Le bas de mon dos est raide. Je ramasse la bouteille de bière ouverte à côté de moi. Ma chemise est déboutonnée comme souvent à cette heure de la nuit. Rien ne paraît simple dans cette chaleur. Tout réclame un effort. J’attend de voir si, comme je le pense, le véhicule va s’arrêter, repartir en marche arrière sur la route, reprendre son chemin, et nous laisser tranquille, comme il le devrait.

Mais il ne le fait pas. Le véhicule reste là où il est ; les phares verts braqués dans ma direction. Et puis, après une longue hésitation ou réticence ou incertitude, le véhicule reprend son avancée, droit sur la maison.

Tu attends quelqu’un ? Je crie à Hen.

« Non, » elle répond depuis le haut des escaliers.

Bien sûr que non. Je ne sais pas pourquoi j’ai demandé. Nous n’avons jamais eu quelqu’un se pointer à cette heure de la nuit. Pas une seule fois. Je prend une lampée de bière. Elle est tiède. Je regarde la voiture qui roule tout le long jusqu’à la maison et se range à côté de mon pick-up.

Eh bien, tu ferais mieux de descendre, j’appelle encore. Quelqu’un est là.

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Foe, le remplaçant, le roman de 2018 de Iain Reid Foe, le remplaçant, le roman de 2018 de Iain Reid

La traduction de Valérie Malfoy de 2021 pour PRESSES DE LA CITE FR

ACTE I

Arrivée

Deux phares. C’est ma vision à mon réveil. Bizarre, cette teinte verte. Pas les phares blancs classiques en usage par ici. Je les repère par la fenêtre, au bout du chemin. Je devais être plongé dans une quasi-torpeur, un téat second engendré par la chaleur nocturne et un estomac plein, et mes yeux s’écarquillent.

Je n’ai pas entendu le moteur, pas été alerté. Mes paupières se sont juste soulevées – et voilà. A croire qu’ils ont surgi de nulle part pour m’arracher à ma léthargie. Ils sont plus brillants que la normale, d’une intensité aveuglante entre les deux arbres morts qui marquent l’entrée de la propriété. Je n’ai aucune idée de l’heure, mais le jour est tombé ; il est tard. Trop tard pour une visite. D’ailleurs, nous avons rarement de la visite.

Personne ne vient nous voir. Jamais. Nous vivons à l’écart.

Je quitte mon fauteuil, m’étire, le dos un peu raide. Puis, emportant ma canette de bière entamée, je marche droit vers la fenêtre. Ma liquette est déboutonnée, comme souvent à cette heure de la journée. Rien n’est facile avec cette canicule, tout nécessite un effort. J’attends de voir si, comme je le pense, le conducteur va se raviser, reculer jusqu’à la route et nous laisser en paix.

Non. La grosse berline stationne, avec ses phares verts braqués dan ma direction. Ensuite, comme après une longue hésitation – réticence ou incertitude –, elle se remet à avancer. Je crie vers le palier :

Hen, tu attends quelqu’un ?

— Non !

Bien sûr. A se demander pourquoi j’ai posé la question. Personne ne s’est jamais pointé ici aussi tard. Jamais. Je prends une bonne gorgée de bière. Tiède. La voiture roule jusqu’à la maison et se gare près de mon pick-up.

Viens quand même. Il y a quelqu’un, dis-je.

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Ici la page du forum Philippe-Ebly.fr consacrée à ce roman.

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