A l'Est du Soleil, à l'Ouest de la Lune, le conte de 1844Feu vert livre / BD

Østenfor sol og vestenfor måne (1844)
Titre français : A l’Est du Soleil, à l’Ouest de la Lune.
Titre anglais : East of the Sun and West of the Moon.

Ce conte est une très probable transposition populaire d'un chapitre des Métamorphoses d'Ovide.

Publié pour la première fois en Norvège dans Norske Folkeeventyr, volume 2 en 1844.
Traduit en anglais notamment sous la direction d’Andrew Langue dans The Blue Fairybook en 1889.
Notamment adapté en français par Anne Dechanet pour une édition illustrée par P. J. Lynch aux éditions Gründ en 1991.

De Peter Christen Asbjörnsen.

Pour tout public.

(Fantasy) Un Ours Blanc frappe à la porte d’un paysan et lui offre d’acheter sa plus jeune fille, la plus belle, pour toutes les richesses dont il rêve. La jeune fille n’est pas d’accord, le paysan et ses frères et sœurs le sont et la jeune fille cède et part à dos d’Ours Blanc jusqu’à un riche château enchanté. Seulement la nuit, un homme qu’elle ne connait pas plus vient visiter son lit dans l’obscurité totale, seulement pour dormir avec elle. La jeune fille s’en accommode, puis comme le temps passe, cela la chagrine et elle commence à se poser des questions…

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Illustration extraite du Blue Fairy Book de 1889 d'Andrew Lang.
Toute ressemblance avec l'héroïne d'à la Croisée des Mondes 1: Les royaumes du Nord de Philip Pullman n'est pas une coïncidence.


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A l'Est du Soleil, à l'Ouest de la Lune, le conte de 1844

Le texte original norvégien de Peter Christen Asbjörnsen extrait de Norske Folkeeventyr volume 2 publié en 1844.

Østenfor sol og vestenfor måne

Det var engang en fattig husmann, som hadde stua full av barn og ikke stort å gi dem, hverken av mat eller klær; vakre var de alle, men den vakreste var den yngste datteren, som var så vakker at det ikke var måte på det.

Så var det en torsdagskveld sent om høsten; det var stygt vær ute og fælt mørkt, og regne og blåse gjorde det så det knaket i veggene; de satt omkring peisen og hadde noe å stelle med alle sammen. Rett som det var, så banket det tre ganger på ruten. Mannen gikk ut og skulle se hva som var på ferde, og da han kom ut, sto der en stor, stor kvitbjørn der.

"God kveld du!" sa kvitbjørnen.
"God kveld!" sa mannen.
"Vil du gi meg den yngste datteren din, skal jeg gjøre deg likså rik som du nå er fattig," sa han.

Ja, mannen syntes det var nokså gildt at han skulle bli så rik, men han syntes da han måtte snakke med datteren først, og gikk inn og sa at det var en stor kvitbjørn ute, som lovte han skulle gjøre dem så rike, når han bare kunne få henne. Hun sa nei og ville nødig, og så gikk mannen ut igjen, og ble så forlikt med kvitbjørnen at den skulle komme igjen neste torsdagskvelden og hente svar. Imens ga de henne hverken rist eller ro, de snakket og leste opp for henne om all rikdommen de skulle komme til, og om hvor godt hun skulle ha det selv, og til sist ga hun seg da. Hun vasket seg og stelte i stand fillene sine, pyntet seg gå godt hun kunne, og holdt seg reiseferdig. Ikke stort var det hun skulle ha med heller.

Neste torsdagskvelden kom kvitbjørnen og skulle hente henne; hun satte seg på ryggen av den med tullen sin, og så bar det avsted.
Da de hadde kommet et godt stykke på veien, sa kvitbjørnen: "Er du redd?"
— Nei, det var hun da ikke.
"Ja, hold deg bare godt fast i ragget mitt, så har det ingen fare heller," sa den.

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La traduction au plus proche du norvégien

A l'est du soleil et à l’ouest de la lune

Il était une fois un pauvre maître de maison qui avait un foyer plein d'enfants et pas grand-chose à leur donner, ni nourriture ni vêtements ; elles étaient toutes jolies, mais la plus jolie était la plus jeune fille, qui était si belle qu'il n'y avait pas moyen de s'en passer.

Puis c'était un jeudi soir à la fin de l'automne ; il faisait mauvais dehors et terriblement sombre, et la pluie et le vent faisaient que les murs se fendillaient ; ils s'asseyaient autour de la cheminée et s'occupaient de tout le monde. Ainsi il en était, lorsqu’on frappa trois fois sur le carreau de la fenêtre. L'homme sortit pour voir ce qui se passait, et quand il fut dehors, il y avait un grand, grand ours blanc qui se tenait là.
— Bonsoir à toi ! dit l'ours blanc.
— Bonsoir ! dit l'homme.
— Si vous me donnez votre plus jeune fille, je vous rendrai aussi riche que vous êtes maintenant pauvre, l’ours déclara.

Oui, l'homme pensa que c'était une bonne chose qu'il devienne si riche, mais il pensa aussi qu'il devait d'abord parler à sa fille, et il retourna à l’intérieur et dit qu'il y avait un gros ours blanc dehors, qui avait promis qu'il les feraient très riche, s’il pouvait l'avoir. Elle répondit non, dégoûtée, alors l'homme est ressorti et s’accorda avec l'ours blanc pour qu’il revienne le jeudi soir suivant pour obtenir sa réponse. En attendant, ils ne donnèrent à la jeune fille ni repos ni répit, ils lui parlèrent et lui firent la liste de toutes les richesses qu'ils allaient obtenir, et à quel point elle allait s’en trouver bien, et finalement elle renonça. Elle lava et arrangea ses haillons, s'habilla du mieux qu'elle pu et se tena prête pour le voyage. Ce qu'elle pouvait emporter n'était pas grand-chose.

Le jeudi soir suivant, l'ours blanc vint la chercher ; elle s’asseya à l'arrière avec son ballot, puis ils s’en allèrent.
Quand ils eurent parcouru une bonne distance sur la route, l'ours blanc demanda : « As-tu peur ?
— Non, je n’ai pas peur.
— Eh bien, tiens-toi bien à mon manteau et tu ne courras aucun danger, dit-il.

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A l'Est du Soleil, à l'Ouest de la Lune, le conte de 1844

Le texte anglais d’Andrew Lang de 1889 pour The Blue Fairybook.

East of the Sun and West of the Moon

Once upon a time there was a poor husbandman who had many children and little to give them in the way either of food or clothing. They were all pretty, but the prettiest of all was the youngest daughter, who was so beautiful that there were no bounds to her beauty.

So once—it was late on a Thursday evening in autumn, and wild weather outside, terribly dark, and raining so heavily and blowing so hard that the walls of the cottage shook again—they were all sitting together by the fireside, each of them busy with something or other, when suddenly some one rapped three times against the window-pane. The man went out to see what could be the matter, and when he got out there stood a great big white bear.
“Good-evening to you,” said the White Bear.
“Good-evening,” said the man.
“Will you give me your youngest daughter?” said the White Bear; “if you will, you shall be as rich as you are now poor.”

Truly the man would have had no objection to be rich, but he thought to himself: “I must first ask my daughter about this,” so he went in and told them that there was a great white bear outside who had faithfully promised to make them all rich if he might but have the youngest daughter.

She said no, and would not hear of it; so the man went out again, and settled with the White Bear that he should come again next Thursday evening, and get her answer. Then the man persuaded her, and talked so much to her about the wealth that they would have, and what a good thing it would be for herself, that at last she made up her mind to go, and washed and mended all her rags, made herself as smart as she could, and held herself in readiness to set out. Little enough had she to take away with her.

Next Thursday evening the White Bear came to fetch her. She seated herself on his back with her bundle, and thus they departed. When they had gone a great part of the way, the White Bear said: “Are you afraid?”
“No, that I am not,” said she.
“Keep tight hold of my fur, and then there is no danger,” said he.

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La traduction au plus proche de l’anglais

À l'est du soleil et à l'ouest de la lune

Il était une fois un pauvre paysan qui avait beaucoup d'enfants et peu de choses à leur donner, que ce soit en nourriture ou en vêtements. Ils étaient tous jolis, mais la plus jolie de tous était la plus jeune des filles, qui était si belle qu'il n'y avait pas de limites à sa beauté.

Un jour - c'était tard un jeudi soir d'automne, il faisait un temps sauvage dehors, terriblement sombre, et il pleuvait si fort et soufflait si fort que les murs de la maison tremblaient à nouveau - ils étaient tous assis ensemble au coin du feu, chacun occupé à quelque chose, quand soudain quelqu'un frappa trois fois contre le carreau de la fenêtre. L'homme sortit pour voir ce qui se passait, et quand il sortit, un grand ours blanc se tenait là.
— Bonsoir à vous, dit l'ours blanc.
— Bonsoir, dit l'homme.
— Veux-tu me donner ta plus jeune fille ? dit l'Ours blanc ; si tu le fais, tu seras aussi riche que tu es pauvre maintenant.

En vérité, l'homme n'aurait eu aucune objection à être riche, mais il se dit à lui-même : « Je dois d’abord parler de ça à ma fille. » Il revint donc à l’intérieur et leur dit qu'il y avait dehors un grand ours blanc qui avait promis sur l’honneur de les rendre tous riches s'il pouvait avoir la plus jeune de ses filles.

Elle refusa et ne voulut plus en entendre parler. L'homme ressortit donc et s'entendit avec l'ours blanc pour qu'il revienne jeudi soir prochain et obtienne sa réponse. L'homme la pressa, et lui parla tellement de la richesse qu'ils auraient, et de ce que ce serait une bonne chose pour elle, qu’à la fin elle se décida à partir, lava et raccommoda toutes ses guenilles, se fit aussi belle que possible, et se tint prête à partir. Elle avait assez peu de choses à emporter avec elle.

Le jeudi soir suivant, l'Ours blanc vint la chercher. Elle s'assit sur son dos avec son paquet, et c'est ainsi qu'ils partirent. Quand ils eurent fait une bonne partie du chemin, l'Ours blanc dit : "As-tu peur ?
— Non, je n'ai pas peur, dit-elle.
— Tiens-toi bien à ma fourrure, et il n'y aura aucun danger, dit-il.

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A l'Est du Soleil, à l'Ouest de la Lune, le conte de 1844

L’adaptation française de Anne Dechanet de 1991 pour Gründ

À l'est du soleil et à l'ouest de la lune

Il était une fois un pauvre homme qui avait tant d’enfants qu’il ne pouvait pas tous les nourrir ni les vêtir. Ses enfants étaient tous très beaux, mais la cadette était de loin la plus jolie, c’était vraiment la plus jolie fillette qu’on puisse imaginer.

Un jeudi soir — on était en automne —, il faisait si mauvais dehors que les murs de la chaumière se mirent à trembler. La nuit était noire, et la pluie tombait, et le vent soufflait. Ils étaient tous assis devant la cheminée, occupés à diverses besognes lorsque, soudain, ils entendirent frapper au carreau de la fenêtre. Le père sortit pour voir ce qui se passait et se retrouva devant un grand Ours Blanc.
— Bonsoir à vous.
— A vous de même, répondit l’homme.
— Accepteriez-vous de me donner votre cadette ? demanda l’Ours. En échange, je vous rendrai aussi riche que vous êtes pauvre.

Devenir riche ne déplaisait pas à l’homme.
Mais il devait d’abord s’entretenir avec sa fille. Il rentra dans la maison et expliqua à ses enfants qu’un grand Ours Blanc attendait dehors et lui avait promis de les rendre très riches s’il pouvait emmener la cadette.
— Non ! s’écria immédiatement la jeune fille. Et il fut impossible de la faire changer d’avis. Alors l’homme ressortit et expliqua à l’Ours Blanc qu’il aurait une réponse le jeudi suivant.
Entre-temps, le père ne cessa de parler à sa fille, de lui dire combien ils seraient riches, et combien elle serait heureuse. Il parla tant qu’elle finit par céder, lava et raccommoda ses guenilles, et se fit aussi élégante que possible. Elle fut bientôt prête à partir. Elle avait peu de choses à emporter.

Le jeudi soir, l’Ours Blanc vint la chercher.
Elle grimpa sur son dos avec son petit baluchon, puis ils partirent. Ils avaient déjà parcouru un long chemin, lorsque l’Ours lui demanda :
— Tu n’as pas peur ?
Non, elle n’avait pas peur.
— Tu ne risques rien si tu t’accroches bien fort à ma fourrure, lui dit l’Ours…

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Ici la page du forum Philippe-Ebly.fr consacrée à ce roman.

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