Le plus dangereux des gibiers, la nouvelle de 1924Feu vert livre / BD

The Most Dangerous Game (1924)

Parue dans le magazine hebdomadaire Collier’s du 19 janvier 1924.
Réédité dans The Argosy, juin 1927.
Traduit en français en 1965 par Jos Ras sous le titre Le Plus dangereux des gibiers.
Compilé dans le recueil Alffred Hitchcock présente : Histoires Abominables au LIVRE DE POCHE FR, réédité le 3 mars 1975, réédité en 1979 et en novembre 1982 chez POCKET FR sous le titre Les Chasses du comte Zaroff.
Réédité en 1965 sous le titre Les plaisirs de la chasse, compilé dans le recueil Les Chefs-d'oeuvre de l'épouvante, chez PLANETE FR.
Retraduit en juin 2014 par Xavier Mauméjean sous le titre Le plus dangereux des jeux dans Le visage vert numéro 24.

Brillamment adapté au cinéma en 1932 par Ernest B. Schoedsack and Irving Pichel, produit par Merian C. Cooper.
Réadapté, plagié et parodié de nombreuses fois depuis.

Nouvelle de Richard Connell.

Pour adultes et adolescents.

(aventure, horreur, presse) Chasseur de gros gibier, Sanger Rainsford et son ami Whitney voyagent en vapeur à destination de la forêt amazonienne pour chasser le jaguar. Après une discussion à propos de l’île voisine surnommée « L’attrape-bateau » qui a mauvaise réputation chez les marins, Whitney va se coucher tandis que Rainsford reste sur le pont pour fumer une pipe. Entendant des tirs de carabine distants, il se précipite au bastingage pour mieux voir, et en trébuchant, passe par-dessus le bord. Rainsford nage jusqu’à l’île et découvre un château luxueux habité par deux cosaques : le propriétaire, le Général Zaroff, et son serviteur de très grande taille, le sourd-muet Ivan.

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Nouvelle phare du domaine de l'Aventure, adapté brillamment pour la première fois par la même équipe que le premier film King Kong, incluant de véritables globe-trotters Merian C. Cooper et Ernest B. Shoedsack des années 1900-1930 dignes de ce nom, en mission pour offrir pour offrir cette aventure authentique au public qui à cette époque ne voyageait certainement pas autant qu'aujourd'hui et n'avait aucun accès aux images en direct di monde entier. La nouvelle et le film de 1932 ont été plagiés, pastichés et parodiés encore et encore, et sont à ce jour dans le domaine public. Le film, bien que lourdement censuré à sa sortie, développe et dramatise avec excellence la nouvelle.

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Le plus dangereux des gibiers, la nouvelle de 1924

Le début du texte original de la nouvelle de Richard Connell, illustrée par W. Emerton Heitland pour COLLIER’S en 1924.

OFF there to the right — somewhere — is a large island, said Whitney. It’s rather a mystery…
— What island is it? Rainsford asked.
— The old charts call it ‘Ship-Trap Island,’ Whitney replied. A suggestive name, isn’t it? Sailors have a curious dread of the place. I don’t know why. Some superstition…
— Can’t see it, remarked Rainsford, trying to peer through the dank tropical night that was palpable as it pressed its thick warm blackness in upon the yacht.
— You’ve good eyes, said Whitney, with a laugh, and I’ve seen you pick off a moose moving in the brown fall bush at four hundred yards, but even you can’t see four miles or so through a moonless Caribbean night.
— Nor four yards, admitted Rainsford. Ugh! It’s like moist black velvet.
— It will be light enough in Rio, promised Whitney. We should make it in a few days. I hope the jaguar guns have come from Purdey’s. We should have some good hunting up the Amazon. Great sport, hunting.
— The best sport in the world, agreed Rainsford.
— For the hunter, amended Whitney. Not for the jaguar.
— Don’t talk rot, Whitney, said Rainsford. You’re a big-game hunter, not a philosopher. Who cares how a jaguar feels?
— Perhaps the jaguar does, observed Whitney.
— Bah! They’ve no understanding.
— Even so, I rather think they understand one thing — fear. The fear of pain and the fear of death.
— Nonsense, laughed Rainsford. This hot weather is making you soft, Whitney. Be a realist. The world is made up of two classes—the hunters and the huntees. Luckily, you and I are hunters. Do you think we’ve passed that island yet?
— I can’t tell in the dark. I hope so.
— Why? asked Rainsford.
— The place has a reputation—a bad one.
— Cannibals? suggested Rainsford.
— Hardly. Even cannibals wouldn’t live in such a God-forsaken place. But it’s gotten into sailor lore, somehow. Didn’t you notice that the crew’s nerves seemed a bit jumpy to-day?
— They were a bit strange, now you mention it. Even Captain Nielsen…
— Yes, even that tough-minded old Swede, who’d go up to the devil himself and ask him for a light…

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La traduction au plus proche.

Là-bas, sur la droite — quelque part — il y a une grande île, disait Whitney. C’est un genre d’énigme…
— Quelle est le nom de l’île ? demanda Rainsford.
— Les vieux relevés l’appellent « L’attrape-bateau », répondit Whitney. Nom suggestif, n’est-ce pas? Les marins sont curieusement épouvantés par l’endroit, j’ignore pourquoi. Quelque superstition…
— La vois pas, remarqua Rainsford, scrutant les brumes de la nuit tropicale qui devenait palpable alors qu’elle pressait sa chaude noirceur contre le yacht.
— Vous avez pourtant de bons yeux, répondit Whitney, avec un rire, je t’ai vue distinguer un élan qui bougeait dans la broussaille brune de l’automne à quatre cents mètres, mais même vous, vous n’arriveriez pas à voir à quatre miles par une nuit sans lune des Caraïbes.
— Ou à quatre mètre, admit Rainsford. Beurk! C’est comme du velours noir mouillé.
— Il fera suffisamment clair à Rio, promit Whitney. Nous devrions y arriver d’ici quelques jours. J’espère que les fusils à jaguars seront arrivés de chez Purdey. Ça devrait nous faire de belles chasses à remonter l’Amazon. Quel sport, la chasse !
— Le meilleur sport au monde, approuva Rainsford.
— Pour le chasseur, rectifia Whitney. Pas pour le jaguar.
— Ne médisez pas, Whitney, répondit Rainsford. Vous êtes chasseur de grands fauves, pas philosophe. Qui s’inquiète du ressenti d’un jaguar?
— Peut-être le jaguar lui-même, observa Whitney.
— Bah! Ils ne comprennent rien.
— Quand bien même, je préfére penser qu’ils comprennent au moins une chose — la peur. La peur de souffrir et la peur de mourir.
— Non-sens, se moqua Rainsford. Ce climat tropical te ramollit, Whitney. Sois réaliste. Le monde est fait de deux classes —les chasseurs et les chassés. Heureusement, vous et moi sommes chasseurs. Pensez-vous que nous ayons déjà dépassé cette île ?
— Je ne peux pas le dire de nuit. Je l’espère.
— Pourquoi ? demanda Rainsford.
— L’endroit a une réputation—une sale.
— Cannibales ? suggéra Rainsford.
— Peu probable. Même des cannibales n’iraient pas vivre dans un trou pareil. Mais il est devenu un conte de marin, on ne sait comment. Avez-vous remarqué comme l’équipage paraissait nerveux aujourd’hui ?
— Ils avaient l’air un peu bizarres, maintenant que vous le dites. Même le capitaine Nielsen…
— Oui, même ce vieux dur-à-cuir de suédois, qui irait déranger le Diable lui-même pour du feu…

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Le plus dangereux des gibiers, la nouvelle de 1924

La traduction française de Jos Ras de 1960 pour Robert Laffont et Le Livre de Poche.

« LA-BAS, quelque part sur notre droite, se trouve une grande île, dit Whitney. Elle est assez mystérieuse…
— Quelle est cette île? demanda Rainsford.
— Sur les vieilles cartes, elle porte le nom de : Piège à Bateaux, répondit Whitney. Un nom qui parle, n’est-ce pas? Les marins ont de ce lieu une appréhension curieuse. Je n’en connais pas la raison. Quelque superstition…
— Je ne peux pas la voir », observa Rainsford, essayant de percer la nuit tropicale, que l’humidité rendait palpable tandis qu’elle emplissait le yacht de son ombre épaisse et tiède.
« Vous avez de bons yeux, dit Whitney, en riant. Je vous ai vu repérer, à plus de trois cents mètres, un original qui se déplaçait dans le brun des broussailles d’automne, mais votre vue ne peut pas porter à quelque six kilomètres, par une nuit sans lune des Caraïbes.
— Ni même à six mètres, admit Rainsford. Pouah! on dirait du velours mouillé.
— Il fera assez clair à Rio, promit Whitney. Nous devrions y être dans quelques jours. J’espère que les fusils pour chasser le jaguar sont arrivés de chez Purdey. Nous devrions avoir quelques bonnes chasses en remontant l’Amazone. Magnifique sport, la chasse.
— Le plus beau sport du monde, opina Rainsford.
— Pour le chasseur, rectifia Whitney. Pas pour le jaguar.
— Ne dites pas de bêtises, Whitney, dit Rainsford. Vous chassez le gros gibier, vous ne faites pas de la philosophie. Qui se soucie des sentiments du jaguar?
— Lui, peut-être, fit remarquer Whitney.
— Bah! Il leur manque l’intelligence.
— Je crois qu’ils comprennent au moins une chose : la crainte. La crainte de la douleur et la crainte de la mort.
— Quelles blagues! dit Rainsford en riant. Cette chaleur vous ramollit, Whitney. Soyez réaliste. Le monde se compose de deux catégories de créatures : les chasseurs et les chassés. Heureusement, vous et moi, nous sommes des chasseurs. Croyez-vous que nous ayons déjà dépassé cette île?
— Je n’en sais rien, il fait si noir. Je l’espère.
— Pourquoi? Demanda Rainsford.
— Cet endroit a une réputation… une mauvaise réputation.
— Des cannibales? suggéra Rainsford.
— Pas exactement. Même des cannibales n’accepteraient pas de vivre dans un endroit aussi abandonné des dieux. Mais on ne sait pourquoi, cette île est connue des marins. N’avez-vous pas remarqué que les matelots avaient les nerfs à vif, aujourd’hui?
— Oui, maintenant que vous me le dites, les ai trouvés un peu bizarres. Le capitaine Nielsen lui-même…
— Oui, ce vieux Suédois endurci, qui irait se présenter au diable en personne, pour lui demander du feu…

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Le plus dangereux des gibiers, la nouvelle de 1924Le plus dangereux des gibiers, la nouvelle de 1924

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Ici la page du forum Philippe-Ebly.fr consacrée à cette nouvelle.

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