The Thing; La chose, La Bête d'un autre monde, la nouvelle de 1938 Feu vert livre / BD

Who Goes There ? (1938)
Traduction du titre original : Qui va là ?

Paru pour la première fois dans le magazine Astounding Science-fiction d’août 1938.
Paru compilé dans un recueil de nouvelles du même titre en 1948 chez SHASTA US.
Retitré en 1952 The Thing From Another World dans une version augmentée de deux chapitres (pour la sortie de l’adaptation filmée de Howard Hawks).
Traduit en français par Alain Glatigny sous le titre La bête d’un autre monde compilé dans le recueil de nouvelles de 1955 Le Ciel est Mort chez DENOEL collection Présence du futur numéro 6, réédité le 31 janvier 1972, réédité en 1981 ;
Réédité en trois parties en anglais dans le magazine américain numéro de mai 1982, Starlog.
Réédité chez LAFFONT en grand format en octobre 1992 ;
Réédité aux USA dans sa version originale de roman sous le titre de Frozen Hell (l’enfer gelé), titre alternatif Pandora.
Version française courte réédité compilée au LIVRE DE POCHE en octobre 2000. Nouvelle traduction française de Pierre-Paul Durastanti aux éditions du BELIAL FR collection une heure lumière.

Adapté au cinéma en 1951 en noir et blanc par Howard Hawkes sous le titre The Thing From Another World (titre français : la Chose d'un autre monde).
Remake du film de 1951 en 1982 en couleurs par John Carpenter sous le titre The Thing (traduction : La chose), avec Kurt Russell.
Remake du film de 1982 en 2011 en couleurs par Matthijs van Heijningen Jr., prétendu se passer en avant en couleurs sous le même titre que le film de 1982 The Thing (la chose), avec Mary Elizabeth Winstead.

De John W. Campbell Jr. aka Don Stuart.

Pour adultes et adolescents.

(Invasion extraterrestre, horreur, monstre, presse) Les chercheurs américains d’une base en Antarctique ont découvert une soucoupe volante sous la glace. Ils la détruisent en cherchant à la dégager, mais parviennent à récupérer un occupant de la soucoupe congelé en tentant de fuir le site du naufrage, et le ramène sur leur propre base.

*

Une des nouvelles les plus populaires de l’histoire de la Science-fiction — de nombreuses fois adaptées pour tous les médias, plagiées et pastichées.

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The Thing; La chose, La Bête d'un autre monde, la nouvelle de 1938 The Thing; La chose, La Bête d'un autre monde, la nouvelle de 1938

Le texte original de Don A. Stuart aka John Campbell Jr. pour Astounding Science-fiction, numéro d’août 1938.

“Who goes there?”

THE place stank. A queer, mingled stench that only the ice-buried cabins of an Antarctic camp know, compounded of reeking human sweat, and the heavy, fish-oil stench of melted seal blubber. An overtone of liniment combatted the musty smell of sweat-and-snow-drenched furs. The acrid odor of burnt cooking fat, and the animal, not-unpleasant smell of dogs, diluted by time, hung in the air.

Lingering odors of machine oil contrasted sharply with the taint of harness dressing and leather. Yet, somehow through all that reek of human beings and their associates—dogs, machines and cooking—came another taint. It was a queer, neck ruffling thing, a faintest suggestion of an odor alien among the smells of industry and life. And it was a life-smell. But it came from the thing that lay bound with cord and tarpaulin on the table, dripping slowly, methodically onto the heavy planks, dank and gaunt under the unshielded glare of the electric light.

Blair, the little bald-pated biologist of the expedition, twitched nervously at the wrappings, exposing clear, dark ice beneath and then pulling the tarpaulin back into place restlessly. His little birdlike motions of suppressed eagerness danced his shadow across fringe of dingy gray inderwear hanging from the low ceiling, the equatorial fringe of stiff graying hair around his naked skull a comical halo about the shadow’s head.
Commander Garry brushed aside the lax legs of a suit of underwear, and stepped toward the table. Slowly his eyes traced around the rings of men sardined into the Administration Building. His tall, stiff body straightened finally, and he nodded : “Thirty-seven. All here.” His voice was low, yet carried the clear authority of the commander by nature, as well as by title.

“You know the outline of the story back of that find on the Secondary Pole Expedition. I have been conferring with Second-inCommand McReady, and Norris, as well as Blair and Dr. Copper. There is a difference of opinion, and because it involves the entire group, it is only just that the entire Expedition personnel act on it.

“I am going to ask McReady to give you the details of the story, because each of you has been too busy with his own work to follow closely the endeavors of the others. McReady ?”


*

La traduction au plus proche.

« Qui va là ? »

L’endroit puait. Une curieuse puanteur mélangée que seule les cabanons de l’Antarctique enfoncés dans la glace connaissaient, un composé d’une sueur humaine infecte, et de la puanteur d’huile de poisson chargée de la graisse de phoque fondue. Une dominante d’huile de lin luttait contre l’odeur musquée des fourrures détrempées par la neige et la transpiration. L’odeur acre de la graisse de cuisson brûlée, et celle animale, pas si déplaisante, des chiens, diluée par le temps, flottait dans l’air.

Les relents persistant d’huile mécanique tranchaient avec le moisi du cirage pour harnais et du cuir. Et pourtant, on ne sait comment, au-delà de toute cette puanteur des êtres humains et de leurs associations—chiens, machine et cuisine—s’insinuait une autre infection. Il s’agissait d’une affaire intrigante, à vous hérisser les poils de la nuque, une odeur étrangère allusive glissée parmi celles des industries et de la vie. Et c’était une odeur vivante. Mais elle provenait de la chose couchée ligotée dans de la toile cirée, sur la table, à dégouliner lentement, méthodiquement, sur les lourdes planches, molle et décharnée directement exposé à l’éclairage électrique.

Le visage de Blair, le petit biologiste chauve, tiquait nerveusement tandis qu’il fixait ce que l’emballage exposait de glace transparente ou opaque, puis il remit précipitamment en place la toile cirée.

Ses saccades d’oisillon impatient faisaient danser son ombre sur la ribambelle de caleçons longs usés gris qui pendaient du plafond bas, la couronne de cheveux hérissés poivre et sels qui ceignait le bas de son crâne dégarni lui faisait un halo comique autour de l’ombre de sa tête.

Le Commandant Garry écarta les jambes laxes d’un caleçon long, et marcha jusqu’à la table. Lentement, ses yeux scrutèrent le cercle des hommes serrés comme des sardines dans le local d’Administration. Sa silhouette longue et raide se redressa enfin, et il hocha la tête : « Trente-sept. Tous présents. » Son ton était bas, mais cependant dénotait clairement l’autorité d’un chef naturel, aussi bien que par le titre.

« Vous connaissez en gros l’histoire de cette découverte au cours de l’’Expédition Polaire d’Appoint. Je me suis entretenu avec mes seconds McReady et Norris, ainsi qu’avec Blair et le docteur Copper. Il y a divergence d’opinion, et parce que cela implique la totalité du groupe, il ne parait que plus juste de demander à l’entièreté du personnel de l’Expédition de prendre une décision.

« Je vais à présenter demander à McReady de vous donner les détails de l’histoire, parce que chacun d’entre voius aura été trop occupé par ses propres missions pour suivre de près les initiatives des autres. McReady ? »


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La traduction de Alain Glatigny de 1955 pour DENOEL, AILLEURS ET DEMAIN, LE LIVRE DE POCHE.

LA BÊTE D’UN AUTRE MONDE

1

Cela puait dans le baraquement enfoui sous la glace. Il y régnait cette étrange odeur composite particulière aux campements de l’Antarctique. Un relent de sueur humaine se mêlait aux lourdes exhalaison de la graisse de phoque fondue et à l’odeur de friture brûlée qui flottaient dans l’air. Un parfum de liniment luttait avec la senteur moisie des fourrures imprégnées de neige et de transpiration. Le temps commençait à diluer l’odeur âcre des chiens, une odeur animale mais pas désagréable ; en revanche, un remugle persistant d’huile à machine tranchait sur les effluves de cuir et de cirage à harnais.

Mais, au milieu de ces odeurs humaines, animales et matérielles, on percevait encore une vague, une agaçante sensation olfactive : elle semblait ne pas appartenir à l’humanité, rester étrangère aux êtres et aux choses terrestres. C’était pourtant une odeur vivante. Elle émanait de ce qui était posé sur la table et qui, ficelé de cordes et enveloppé dans un prélart, s’égouttait avec une lente régularité sur les lourdes planches : c’était humide, c’était froid, et la lumière crue de la lampe électrique y sculptait des ombres brutales.

Blair, le petit biologiste chauve de l’expédition, tripotait nerveusement l’enveloppe du paquet ; il soulevait sans cesse un coin de la toile goudronnée et la laissait aussitôt retomber, après avoir découvert, pendant quelques secondes, la glace bleuâtre et transparente. Sa curiosité mal réprimée lui arrachait de petits mouvements d’oiseau qui faisaient danser sur l’écran grisâtre de linge sale suspendu au plafond une ombre comique, auréolée par la couronne de cheveux qui se dressait autour de son crâne dénudé.

Le commandat Garry repoussa les jambes molles d’un caleçon qui se balançait devant lui et s’approcha de la table. Du regard, il fit lentement le tour des hommes entassés à l’intérieur du baraqueemnt A (le centre administratif de l’expédition).
— Trente-sept… Tout le monde est là, dit-il en redressant son grand corps osseux.
Il n’avait pas élevé la voix, mais on y devinait cette autorité naturelle que le grade seul ne peut donner au chef.

— Vous connaissez déjà dans ses grandes lignes l’histoire de la trouvaille faite par l’expédition du pôle secondaire ? Je viens d’avoir une conférence avec MacReady, le commandant en second, ainsi qu’avec Norris, Blair et le docteur Copper. Les avis sont partagés. Comme la question vous intéresse tous, il est bien juste que l’expédition tout entière participe à la décision finale. MacReeady va vous donner les détails nécessaires puisque chacun d’entre vous a été trop accaparé par sa propre besogne pour s’occuper de celle des autres. MacReady, nous vous écoutons.



*

The Thing; La chose, La Bête d'un autre monde, la nouvelle de 1938

La traduction de Pierre-Paul Durastanti de 2020 pour LE BELIAL.

LA CHOSE

1.


Ça PUAIT, là-dedans.

De la puanteur singulière, brassée, des casemates d’une base antarctique enfouies dans la glace, où se mêlaient les relents de sueur rance et l’arôme de friture de la graisse de phoque fondue. Une popinte de pommade combattait l’odeur de moisi des fourrures qu’imprégnaient la sueur et la neige. Dilués par le temps, le fumet âcre de l’huile de friture brûlée et le bouquet presque plaisant des chiens planaient.

Un effluve de lubrifiant s’attardait, contrastant avec des notes de cuir et de cirage à harnais. Mais, à ce bouquet d’humains et de ce qu’on leur associe — chiens, machines, cuisine —, s’ajoutait une autre senteur. Insolite, à vous faire dresser le poil sur la nuque, elle suggérait la vague présence d’une émanation étrangère parmi les remugles de l’activité et de la vie — une odeur de vie, oui, mais issue de la chose posée sur la table et emballée dans une bâche ficelée avec soin qui s’égouttait lentement, méthodiquement, sur les planches grossières. Sous l’éclat cru de la lumière éléctrique, elle apparaissait froide, humide, décharnée.

Blair, le petit biologiste dégarni de l’expédition, triturait cet emballage avec nervosité, tantôt exposant la glace bleue transucide, tantôt remettant la bâche en place — sans arrêt. Ses gestes d’oiseau trahissant son impatience faisaient danser son ombre sur le feston de sous-vêtements grisâtres accrochés au plafond bas. Sa frange de cheveux raides parait sa silhouette d’une auréole comique.

Le commandant Garry écarta du bras les jambes flasques d’un caleçon long, s’avança jusqu’à la table, suivit des yeux les cercles concentriques d’hommees tassés telles des sardines dans le Centre, étira son long corps dingandé et enfin, opina du chef. « Trente-sept. Effectif au complet. » Sa voix, quoique mesurée, recelait l’autorité sans faille de celui qui commande par nature autant que par sa fonction.

« Vous connaissez dans ses grandes lignes le contexte de la découverte effectuée par l’Expédition du pôle secondaire. J’ai consulté le commandant en second McReady et Norris, ainsi que Blair et le docteur Copper.

« Une différence d’opinion a surgi et, comme la situation implique le groupe entier, il n’est que justice de laisser tout le personnel décider.

« Je demande à McReady de vous communiquer les détails de l’histoire, puisque chacun était trop absorbé par son travail pour suivre de près les efforts de ses collègues. Mac ? »


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Ici la page du forum Philippe-Ebly.fr consacrée à cette nouvelle.

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